Parlez-moi d'amour - Raymond Carver (1974 - 1981)

C’est un recueil de 17 nouvelles. Brèves. Déterminées comme des têtes de microscope braquées sur des bouts de vies, avec des êtres humains coincés à l’intérieur, qui se débattent et l’ignorent peut-être.
Les personnages de Carver ne sont pas vraiment debout. Plutôt à genoux, mais pas immobiles. Ils avancent à genoux parce qu’il est trop tard pour se relever et encore trop tôt pour crever. A genoux et de préférence courbés, les yeux au sol, de sorte à ce que leurs regards ne se croisent jamais, ou rarement – lorsqu’une histoire commence et qu’il fait jour, uniquement ; que le soleil brille et qu’on a tout l’air de s’aimer.

Mais Carver sait bien qu’on ne s’aime pas, qu’on ne s’aime plus ; que ça ne pouvait pas durer bien longtemps cette histoire. Alors le fil bascule, comme une petite scène peuplée de personnages, qu’on inclinerait peu à peu en direction de l’eau – opaque ?

C’est une Amérique moderne que l’auteur dépeint. Il en prélève des extraits, des particules de rien du tout, puis s’immerge en elles, parce qu’il semble les avoir approchées de près. L’écriture de Carver est une urgence de dire. De s’investir dans la chair mentale de ses personnages et de les rendre authentiques, sans façons, sans tricherie.

Mais la scène s’incline, souvenez-vous.
La fin nous tord le cou.
Ce n’est pas d’une chute qu’il s’agit, mais de sa réception.