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Lille aux mortes - Cyril Herry (2008)

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Message par limbes Mar 12 Aoû - 1:43

Anti-chronique croisée, ou : il n’y a pas de point Y.

On ne sait pas toujours pourquoi, à tel ou tel moment, on fait telle ou telle expérience littéraire ou cinématographique.
Parfois c’est le hasard, les circonstances, une recommandation, une recherche, une envie de, ou juste l’ "objet " qui est là, sous notre nez, depuis des jours et des jours ; ou bien on ne savait pas quoi faire, ne rien faire étant exclu (pourtant, c’est bien) ; ou alors, on souhaitait se divertir, penser à autre chose, être content, ou pas. Enfin bref.
On ne sait pas non plus pourquoi des résonances se créent, ou un fil conducteur, ténu, entre des œuvres qui n’ont a priori rien à voir. Est-ce ce qu’on porte en soi qui se focalise spécifiquement, une sorte de subjectivité prédatrice, ou y a-t-il des matériaux universels qui se télescopent d’une œuvre à l’autre pour peu qu’on veuille bien les mettre en relation – dans la ligne de mire ?

Récemment, j’ai plongé dans la tête d’un type, sur une île, en noir et blanc. Des images.

Lille aux mortes - Cyril Herry (2008) Heure-loup5

(L'heure du loup - I. Bergman - 1967)

Peu après, une autre tête, un autre type, d’autres types, dans une ville. Des mots.

Lille aux mortes - Cyril Herry (2008) Lille_aux_mortes02

Des mots et des images, pour des rondes infernales, peuplée de monstres intérieurs, mais pas que les leurs, les nôtres, aussi.

Au centre, le passé, et les obsessions.
Passé Composé.
Recomposé.
Décomposé.
Pas le passé comme un stock garni de cartons bien rangés, étiquetés, qu’on sort et qu’on range à la demande. La mémoire est plus retorse, c’est une trieuse recycleuse impitoyable, une travestie transformiste, aussi. Elle amalgame, elle recrée, elle hante.

Comment faire avec le passé et les êtres qui s’y sont déployés ?
Que fait-il avec nous ?
Faut-il lui tordre le cou (c’est dur, il y a un goitre) ? Peut-on le faire ? Comment ? Que peut-on décider ?
Comment vivre ? Comment créer ? Que vivre, que créer ?

Ce qui me paraît très intéressant, ce sont les processus mentaux, et la façon de les mettre à nu (la forme, cruciale), de telle sorte qu’ils renvoient à cet espace indéfini, non-dit, ou non montré, dans lequel on ne sait plus vraiment ce qui est réel de ce qui est fantasmé ou imaginé ; ce qui est vécu extérieurement, de ce qu’on vit intimement.
Non pas deux terrains étanches, donc, mais bien au contraire cette imbrication extrême, ce tissage secret et pour une large part inconscient, qui renvoient à nos propres bricolages intérieurs.

Je n’ai pas envie de raconter ces deux histoires, non pour ne pas déflorer le suspense, ou parce que je pense que les histoires en général n’ont aucune importance, mais parce qu’il me semble que l’essentiel, ici, n’est peut-être pas là. Ou plutôt, parce que les faits, horribles (si tant qu’on puisse les isoler certainement, dans le film de Bergman), sont vampirisés par une substance autre qui les dilatent, les compliquent, les ramifient ( ?).
On ne part pas d’un point X pour aller à un point Y, moyennant quelques embûches savamment distillées, dans une sorte de croyance historique causes- conséquences évidentes, mais on investit le territoire accidenté et en friche d’êtres humains, artiste raté et/ou tueur en série.
Des êtres humains comme moi, même si je ne tue pas – pas en vrai.

*

Que fait-on de nos obsessions ?

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Message par edmond Gropl Jeu 14 Aoû - 15:50

Terminé dans la nuit.

Une grande qualité: C'est de l'ouvrage écrit et pensé. Ecrit, car il y a un style classieux (j'aime beaucoup la précision), pensé parce qu'il y a un parti pris, une volonté de créer quelque chose de singulier (et non pas celle d'épater la galerie par de l'ultra violence ou du sur-scabreux). Ca reste agréable, dans la catégorie du polar, d'être confronté à un auteur et non pas à un petit malin

Quelques défauts: Un manque de suspens dû à mon avis à un recit trop linéaire, une narration trop lointaine une absence de déterminisme. On (enfin, je) ne perçois pas tres bien dans quelle toile d'araignée sont pris les deux principaux personnages. Mais bon, ça passe parce que ça reste logique, enfin une conséquence logique de l'esthétisme de l'objet.

Dans l'ensemble, je pense sincèrement que c'est un bon et solide premier livre. Je suis content.
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Message par txoa Jeu 14 Aoû - 19:33

Commandé au libraire.
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Lille aux mortes - Cyril Herry (2008) Empty Quelques extraits de Lille aux mortes - Cyril Herry

Message par Replay Lun 18 Aoû - 13:35

Quelques extraits:

Il se mit à photographier les détails, la trajectoire des yeux de Deborah, le dessin animé de ses mains, de ses lèvres, de ses doigts. Elle portait une robe violette qui épousait son corps et s'arrêtait net à mi-cuisses. Le col au ras du cou s'ornait d'un collier rigide en métal argenté, assorti aux boucles d'oreilles et au bracelet au poignet droit. Elle remuait beaucoup, souriait, riait. glissait des bribes de phrases dans l'oreille de son amie, et inversement. Buvait, suspendue aux danseurs.

Et Fischer sentit bien qu'elle n'allait pas surgir cette nuit-là. Que le fantôme lui ficherait la paix parce qu'il était tout près, juste là. Il cessa d'épier l'heure et elle finit par se jeter dans la foule pour en imiter les mouvements, ainsi que son amie. Pendant des heures, il les regarda faire des aller-retour des sièges à la piste et de la piste aux sièges. De temps en temps, des sièges au comptoir. Deux pantins programmés dans une marée haute concentrée de congénères survoltés, syncros. (p. 28)


Le tueur était passé à travers les mailles du filet au cours de ses premières excursions nocturnes parce qu'il avait coiffé ses cheveux en arrière ou exagéré sa raie sur le côté. Par la suite, parce qu'il était devenu un chauve à moustache à l'air idiot mais inoffensif, qu'on n'ose pas regarder en face.
Fischer était toujours en liberté parce qu'il avait misé sur les probabilités. Il sortait peu de chez lui, oui, mais tout de même il circulait et n'avais pas recroisé une seule fois certains de ses fantômes alors qu'ils vivaient dans la même ville. Fischer s'était ainsi livré au périlleux jeu des circonstances et des hasards qui se déroulent et se combinent sans cesse dans le dédale des villes, comme dans celui des pensées qu'on se met en tête et qui, brusquement, se trouvent embrouillées par d'autres qu'on n'a pas convoquées. Elles surgissent sans raison apparentes ou bien à cause d'un signe, d'une odeur, d'une musique, d'un lieu, d'un objet, et tout bascule. (p.174)
La ville est poreuse, pensa Fischer. Pleine d'orifices et de lézardes par lesquels les corps se diffusent et s'échappent du nid, comme des filets d'eau que la terre ne parvient pas à contenir. Comme cette saignée, là, ocre et sinueuse vue du ciel; une voie ferrée à double sens où l'homme marchait depuis des heures. (p.187)

***


Les fantômes de Fischer, les errances de Fischer...

Le serial killer diaboliquement intelligent n'existe que dans les romans.

Dans la vie, c'est un débile mental, ou un fou qui entend des voix, qui ne résiste pas à ses impulsions, un killer qui ne devient serial que parce qu'il ne s'est jamais fait prendre par chance ou par malchance.
On lit "serial killer" et on voit déjà les flots de sang, les tortures, la violence en veux-tu en voilà, le duo de flics qui finit (triomphe du Bien) par arrêter (s'il ne s'est pas mis à mort lui-même d'une façon particulièrement atroce) le type dans un décor de tripes exubérantes, lourdement décrit à l'aide d'un vocabulaire enlisé dans un champ lexical plus kitsch que ça tu meurs.

Bon, là, ce n'est pas ça. On dirait une histoire possible. Ce Fischer qui marche sur la voie de chemin de fer a échappé aux flics, pas parce que les flics sont idiots mais parce qu'on ne peut pas prévoir les actes d'un fou intelligent. On ne les voit pas beaucoup dans le livre, mais ils finiront un jour par le coincer, à moins que sa douleur ne le condamne avant et qu'il ne s'offre lui même à la potence.
C'est une histoire de serial killer si on veut, c'est un polar écrit en région si on veut, et autre chose si on lit d'une façon un peu plus buissonnière. Un parti pris d'écriture avec un traitement de l'image toujours présent, prégnant. Les couleurs, par exemple: les filles vivantes sont habillées de saumon, crème, violette, la lumière les nimbe, et dès que Fischer pose sur elles les yeux et plus tard son corps, c'est le noir blanc gris avec reflets verdâtres qui prédomine. Les rues, les lignes, le cadrage, le point de fuite en plans lumineux pour la vie au grand jour et le film qui s'assombrit sur les entrelacs, les murs qui suintent, pèlent et s'effondrent pour le coeur qui s'affole, la sueur qui coule, la peau et les viscères qui gonflent après la mort.
Il n'y a pas de suspens, c'est un récit un peu linéaire et lointain, comme dit Gropl. On aimerait bien avoir des clés. Pourquoi veut-il toutes les tuer? dit le bandeau .

Du dérèglement mental de Fischer, on ne saura pas grand-chose; la folie est incohérente et on trouve plus facilement une explication après. C'est un homme qui a la mémoire très malade et qui ne peut pas ranger ses souvenirs, il est trop encombré, envahi, il n'a plus de place pour exister, il n'a pas d'autre solution que de tuer chaque fille qu'il a touchée. C'est comme s'il se castrait à chaque fois, comme s'il lavait son cerveau à grande eau ainsi que les rues de la ville le matin quand on ouvre les vannes. Les poubelles sont dans les rues, pleines d'ordures, la ville tient debout, vit avec ses façades lézardées, ses ruines, ce qui se décompose et qu'on ne voit pas et Fischer y jette des corps de femme, ce sont ses tags à lui.
Il est possédé par ses fantômes et on ne peut pas le juger, ni le haïr, ni l'aimer, ni se dire qu'un bon traitement psychiatrique lui calmera ses angoisses. On est dans le no man's land, dans le blues de la peur, pas de la peur qui thrille mais de celle qui rend triste.

***


On peut lire une critique de Lille aux mortes sur Plume libre, en discuter avec l'auteur ici, ou sur son site encrezone
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Message par txoa Jeu 2 Oct - 19:51

Commandé depuis le 26 aout et le libraire ne l'a toujours pas reçu... Du coup il gueule après Ouest France Distribution. Ca commence à bien faire.
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Message par txoa Lun 3 Nov - 21:33

Il a fallu deux mois mais je l'ai eu. Problèmes de distributeur.

Le roman: j'avoue d'emblée que les histoires de serial killers, c'est pas mon truc. Toutefois j'ai lu le roman avec plaisir car il évite, comme le dit Gropl, l'écueil du scabreux, de l'ultra violence délibérée et racoleuse. C'est sérieux et tendu. Est ce le fait de se tenir à cette louable exigence qui fait qu'il manque peut être de faits saillants ? Gropl parle de récit trop linéaire, je suis assez d'accord, encore. Il dit aussi que ça manque de déterminisme, je dirais plutôt de perspective.
Ce n'est pas un roman psychologisant, rien ne nous est dit au sujet des troubles de Fischer. Il (le roman) se situe plutôt dans la veine comportementale. Si du côté de Fischer, je trouve ça plutôt intéressant, il m'a manqué quelque chose au sujet du flic. Un peu de psychologie peut être, justement. S'il est impossible de s'identifier à Fischer (et c'est bien comme ça), on peut s'identifier à Treuil et il m'a manqué quelque chose à son sujet. Je le soumets au débat, en tous cas.
Un détail: j'ai trouvé les références musicales trop présentes mais peut être est ce parce que elles ne ma causent pas. Disons que ça "surfait" un peu le récit. (c'est pas une jolie phrase, désolé).

En tous cas, voilà un premier roman ambitieux que je trouve brillant et surtout honnête. On ne peut que louer l'intégrité de son auteur.
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Message par edmond Gropl Lun 3 Nov - 23:14

txoa a écrit:
Un détail: j'ai trouvé les références musicales trop présentes

C'est vrai que pour ma part, j'ai du mal à concevoir un tueur pathologique qui aurait des gouts musicaux sophistiqués. Je ne dis pas que ça n'existe pas, j'ai simplement du mal à le concevoir. ( comme Hannibal lector par ex.)
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Message par stalker Lun 3 Nov - 23:30

Mais le tueur ne fait qu'écouter la radio.
La symphonie de Dante, de Franz Liszt n'est pas ce qui se fait de plus sophistiqué, ni Les quatre saisons de Vivaldi. John Adams et Morton Feldman, certainement un peu plus, en effet.
Mais tout ceci est diffusé à la radio.

Qu'entendez-vous par "sophistiqué" ? Vous voulez dire "actuel" ? "Contemporain" ?
Je suppose qu'il aurait été plus convenable que le tueur écoute du jazz et des vieux trucs des années 60/70 (pour coller aux références courantes du lecteur de polar) mais ce bouquin se déroule au présent.
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Message par txoa Mar 4 Nov - 0:18

Stalker, tu prends la mouche (et là, presque j'apposerai un smiley rigolard).
Disons qu'il a des goûts "pointus" et ce qui sort de la radio quand il l'allume n'est pas du tout-venant radiophonique.
Disons qu'il est plus France musique que NRJ. Même que France inter ou france Culture, d'expérience.
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Message par stalker Mar 4 Nov - 1:00

Désolé d'avoir l'air de prendre la mouche, Txoa.
J'accorde simplement beaucoup d'importance au rapport musique / écriture.

La plupart des références citées dans ce roman, on peut les saisir sur France-Inter (c'est le cas par exemple de Nouvelle Vague, de Placebo ou de John Adams - dont le tueur connaît une pièce par coeur et murmure, partie après partie, à la fin du roman). France-Inter propose une multitude vraiment très variée d'émissions consacrées à notre temps, dans tous les registres imaginables, mais, visiblement, tu connais bien cette onde aussi.
On en trouvera d'autres plus couramment sur France-Culture, comme Liszt ou Vivaldi.
Morton Feldman interprété par Kronos Quartet, je doute que ça passe bien à la radio, en revanche.

Et c'est une fiction avant toute chose. Ce qui signifie que tout y est possible et qu'un roman peut aussi proposer des choses, créer des situations, tenter des expériences, révéler des univers. Quitte à le faire en sachant que le commun des lecteurs ne possèdera pas toutes les références citées, voire qu'il n'en possèdera absolument aucune, malgré qu'elles soient presque toutes contemporaines.
Je reste convaincu que la musique dans un livre, comme dans un film, constitue un témoin fiable de son époque et offre des pistes, aussi, sur la nature des personnages ; leurs vécus, leurs goûts, leurs répulsions. Ce sont des indices précieux et signifiants. Même si, effectivement, on n'entend pas la musique dans les pages. Les plus curieux peuvent faire l'effort de la découvrir, s'ils le souhaitent, et les autres peuvent continuer de déplorer qu'on n'ait pas tenu compte des goûts du tout-venant.


Dernière édition par stalker le Mar 4 Nov - 1:46, édité 1 fois
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Message par stalker Mar 4 Nov - 1:13

Au cinéma, David Lynch a osé des choses très fortes à ce niveau-là, en particulier avec Lost Highway (avec la complicité étroite de Trent Reznor, du groupe Nine Inch Nails).
Dans le registre du polar, il me semble que Marc Villard n'hésite pas à injecter des références très actuelles dans certains de ses textes. Jan Thirion n'hésite pas non plus à "sonoriser" ses romans avec des références de son temps, et à parler de "chanteurs morts", aussi, dans le cas inverse (dans Mikko, notamment), y compris pour des chanteurs toujours en vie.

On avait abordé ce sujet sur le forum Le coin polar, il y a quelques mois, à l'occasion d'un événement consacré au rapport du polar au rock, je ne sais plus dans quelle région exactement. Les références qu'on trouvait dans le programme n'excédaient pas les années 70.
Je trouve ça regrettable, tout de même. Quarante piges. Ce qui n'empêche pas d'apprécier les dinosaures en question, bien sûr, mais à l'allure à laquelle file notre époque, je trouve dommage qu'on se tienne à Led Zeppelin, les Clash ou au jazz de la côte ouest américaine des années 50 dans une littérature supposée refléter le présent.
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Message par edmond Gropl Mar 4 Nov - 17:48

Sophisitiqué n'est peut-être pas le bon terme, c'est plus le fait que ton personnage tueur puisse avoir des gouts musicaux, des aspirations musicales (bien qu'il ne fasse qu'écouter la radio) qui destabilise ma perception de la situation, du moins déstabilisée lors de la lecture. A present c'est un peu plus clair, faudra que je relise les passages (cette discussion m'en donne envie). C'est juste la superposition des pulsions criminelles et de l'ecoute musicale, choses assez inconcevables chez moi, choses antagonistes mais peut-être uniquement dans ma perception des choses. Le problème (enfin mon problème)vient du fait que tu nommes les morceaux. Si ils avaient été décrits (pas facile) c'aurait peut-être été différent. Mais en les nommant par narration (ce qui crée une distance) il se passe deux choses: soit le lecteur connait pas et dans ce cas, il ne peut se referer qu'a la musicalité du titre (Chronos quartet, ça sonne bien), soit il connait (ce qui est mon cas pour Franz Listz) et il est alors saisi par la musique et perd alors sa vision de la situation. Je ne sais pas si je suis tres clair.
Dans le cas du livre, le fait que je me sente déstabilisé par ces passages est une bonne chose. Ce serait un réel problème si le livre était mal écrit. En fait je m'apercois que je ne trouve pas trop de polar comparables, ca me parait être un signe de qualité. Ecrire quelque chose de singulier.

(Sur le rapport musique et polar, il me parait incontournable de lire deux livre de cet auteur particulier qu'est l'helvete, l'helvete underground que je nomme J.J. Busino, publié chez rivages noir: Dieu à tort et la dette du diable.
Dans ces deux livres la musique est un personnage, une maitresse pousse au crime. Dans Dieu à tort, on est dans le rock (le livre s'ouvre sur une scène ou le personnage casse en deux ses vinyls en commencant par les Clash, a un autre moment, il viole une table de mixage, dans "La dette du diable", c'est la musique de Pierre boulez, enfin cette lignée, qui devient fortement criminogène.)
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Message par txoa Mar 4 Nov - 21:17

Remarque que j'ai déjà faite, faut être fada, limite psychopathe, pour bousiller ses vinyles des clash. Et une table de mixage, ça me met en colère parce que j'en cherche une...(d'ailleurs si vous avez ça au fond d'un grenier).

Je suis d'accord avec toi Stalker, lorsque tu dis que la musique est témoin d'une époque. Mais ce qui est le plus fréquemment entendu à notre époque n'est pas pointu-pointu: la mélasse radiophonique quotidienne. Pour écouter beaucoup France inter (mais pas la nuit, c'est vrai), on entend beaucoup de choses qui, sans être désagréables, n'ont que peu de caractère et surtout peu d'engagement. Et ça, c'est bien caractéristique de notre époque. On parle de mélodies "agréables" ou, comble de l'horreur, de "textes ciselés".

Par contre la musique peut dire aussi beaucoup d'un personnage. Et là, les "chanteurs morts" ont toute leur importance. Ce serait compliqué de parler de mézigue sans évoquer les Clash, par exemple.
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Message par stalker Mer 5 Nov - 0:15

txoa a écrit:

Je suis d'accord avec toi Stalker, lorsque tu dis que la musique est témoin d'une époque. Mais ce qui est le plus fréquemment entendu à notre époque n'est pas pointu-pointu: la mélasse radiophonique quotidienne. Pour écouter beaucoup France inter (mais pas la nuit, c'est vrai), on entend beaucoup de choses qui, sans être désagréables, n'ont que peu de caractère et surtout peu d'engagement. Et ça, c'est bien caractéristique de notre époque. On parle de mélodies "agréables" ou, comble de l'horreur, de "textes ciselés".

Cette fois, on tombe d'accord.
Et la musique n'en est que mieux témoin de son époque, pour toutes les raisons que tu cites.
Je te conseille tout de même de découvrir Shaker loops, de John Adams, à l'occasion.
Dans un autre registre, (la charmante) Peaches pourrait aussi te parler, avec son côté complètement parodique et déjanté.

txoa a écrit:
Par contre la musique peut dire aussi beaucoup d'un personnage. (...)

Je l'entends comme ça aussi, précisément.
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