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Siniac, Pierre - Carton blême (1985 - Rivages 2003)

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Siniac, Pierre - Carton blême (1985 - Rivages 2003) Empty Siniac, Pierre - Carton blême (1985 - Rivages 2003)

Message par stalker Mar 23 Juin - 16:14

Nous sommes entrés dans le troisième millénaire, et le déficit de la Sécu est abyssal. A tel point que le nouveau gouvernement a institué le check-up mensuel obligatoire pour tout citoyen âgé d'au moins seize ans. A l'issue de cette visite, le citoyen reçoit ou un carton bleu, ou un carton blême. En cas d'agression, de cambriolage, etc., le titulaire du carton bleu a droit à l'aide de la police. En revanche le porteur du carton blême se voit opposer un refus d'assistance (tout a fait légal). C'est dans ce contexte futuriste, aussi "logique" que cauchemardesque, que le nouveau patron de la Crim', Paul Heclans, doit affronter un serial killer, "le dingue au marteau", dont la spécialité est de prendre le profil de ses victimes pour une enclume.

Siniac, Pierre - Carton blême (1985 - Rivages 2003) 9782743611019

La hantise des citoyens n’est pas de tomber malade, de choper un fichu cancer, d’être victime d’une insuffisance quelconque, d’être diminué physiquement, mais bien d’être cartonblêmisé. Une patrouille de police est alors en droit de vous regarder vous faire égorger en pleine rue si elle sait que votre carton n’est pas bleu. Elle interviendrait qu’on la sanctionnerait lourdement. Et chaque nuit c’est pareil : on égorge, on éventre en toute légalité ; on balance des corps par les fenêtres, on écrase des cabines téléphoniques au bulldozer dans lesquelles se sont réfugiés des porteurs de carton blême ; on broie aussi leur tête avec un marteau.

Dans quelle ville se déroule donc ce récit ? Dans quel Etat ? N’importe quelle ville et n’importe quel Etat. Seule l’époque compte. Nous sommes en 2005 et, pour que les forces de l’ordre atteignent une efficacité optimale, il faut sélectionner les citoyens et les ranger en deux catégories : les bien-portants et les autres.
Naturellement, aux commandes de cet Etat, on trouvera des politiques véreux et des esprits pervers, soit pour les soutenir, soit pour profiter de la situation (des lois) et amasser des fortunes. Puisque, naturellement, il y aura fraudes, débordements, infractions. En l’occurrence, on se posera tôt la question : que se passe-t-il lorsqu’un homme de pouvoir devient cartonblêmisable ? Et un haut fonctionnaire de l’Intérieur ?

Et le Dingue au Marteau, dans toute cette histoire ? Un accessoire. Le fruit exemplaire d’une société hyper-civilisée et structurée, mais dépassée par les paradoxes de ses lois et de sa morale. Sa propre nature et ses ambitions, aussi. Par ailleurs, la ville que décrit Siniac est une certaine forme d’Enfer, irrespirable, sale, obscure, ceinturée de complexes industriels abandonnés, de décharges publiques géantes, de rues glauques, de vestiges d’une ère déchue qu’on voudrait redresser, perfectionner, magnifier.

Siniac livre cet enfer avec une lame tranchante fixée à sa plume. Il ne verse pas dans la formule embellie, soignée, limpide ; il coupe, perfore, agresse le corps-même de son texte pour le rendre fidèle au monde qu’il décrit et peuple de personnages – encore un peu humains, parfois, mais plus beaucoup, ou plus pour très longtemps.

De cette écriture jaillissent ainsi des extraits de presse écrite, des extraits de rapports officiels, des messages radios, des archives personnelles de Ministre, des propositions de lois et de réformes, chiffres, courbes, statistiques jointes ; le tout en bonne et due forme, rendus tels quels dans le livre. Alternés de récits de faits divers, du plus sordide au plus inquiétant. Quelques lueurs brillent bien ça et là, mais pas évidentes à capter, tant on est absorbé par le dédale à peine grotesque, et préoccupé par notre sort, au fond. Une vilaine angine qui dégénère un peu et on te livre en pâture aux malfaisants de toutes espèces ; des éradicateurs conventionnés, en somme. Bien pratique pour l’Etat.



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