Bad Dog - Elisa Vix (2006)

Roman policier écrit par Elisa Vix, vétérinaire de profession, et prix du polar au salon de Montigny-les-Cormeille. En cours d'adaptation pour France2.

LE THÈME : À Soissons, plusieurs femmes sont égorgées par des rottweilers. Accidents ? C'est ce qu'on croit au début. Mais les inspecteurs Sauvage et Joana, accompagnés par la nouvelle Laure Bettinger, mènent une enquête qui leur fait soupçonner une autre réalité.

LE POSITIF : Voilà vraiment un concept original. Elisa Vix reprend les personnages classiques du polar, mais en les accommodant à sa sauce. Le flic est un dragueur pas forcément sympathique et en butte à son ex-femme et son petit garçon (il évoque assez le héros de la série "Californication"). Sa collègue est une femme taillée comme une nageuse de l'ex-Allemagne de l'Est. Et la nouvelle, Laure, sous couvert de froideur, se révélera une vraie nymphomane. Tout le bouquin est un défilé de personnages pittoresques, représentant autant d'aspects de notre société. Quant au style, il est original aussi : avec un humour féroce, Elisa multiplie les phrases cinglantes. Enfin, il y a le côté documentaire sur les chiens, à propos desquels on apprend beaucoup de choses.

LE NEGATIF : Chacun ayant les défauts de ses qualités, Elisa s'amuse tant avec ses personnages qu'elle donne parfois l'impression de ne pas trop s'intéresser à l'histoire qu'elle raconte. Impression sans doute fausse, mais il est vrai qu'on prend tellement de plaisir à suivre les héros que le dénouement de l'intrigue paraît secondaire.

CONCLUSION : Elisa a trouvé un concept original et qui accroche dans le cadre du polar actuel. Je comprends que la télévision s'y soit intéressé. La question est : comment reconstituer sur l'écran le style si particulier d'Elisa ? Moi, je ne vois pas.

MEILLEURES PHRASES : Alors, là, il y en a tellement qu'on pourrait, et devrait, faire une liste des mots d'Elisa. On trouve deux ou trois phrases cinglantes à chaque page. En attendant, j'ai appris qu'ouvrir une association pour l'apprentissage de la lecture en braille était un bon moyen pour se taper des nanas : je sais ce que je vais faire avec mes économies !

Pouah, tu lis à la vitesse de l'enfer, Manuel !

Reçu avant hier soir et déjà chroniqué - fort !

Moi en 15 jours, j'ai pas réussi à franchir la moitié ( bon je bosse aussi ).

Avec une critique aussi élogieuse, cela doit ronronner dans l'Olympe ! Hélas, pas d'exemplaires encore dans les soixante bibliothèques de ma ville. Je vais devoir attendre...

Varg a écrit:Avec une critique aussi élogieuse, cela doit ronronner dans l'Olympe ! Hélas, pas d'exemplaires encore dans les soixante bibliothèques de ma ville. Je vais devoir attendre...

Moi l'avoir emprunté par hasard d'ailleurs à la biblio de Nantes...et je l'ai rendu, attention !

novi a écrit:Pouah, tu lis à la vitesse de l'enfer, Manuel !

Reçu avant hier soir et déjà chroniqué - fort !

Moi en 15 jours, j'ai pas réussi à franchir la moitié ( bon je bosse aussi ).

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P.S. : Je bosse aussi.

Je bosse pas et je trouve ça bien. Envie de me relire Lafargues.

Son merveilleux Droit à la paresse est disponible numériquement ici :

Le droit à la paresse (1880)

Bad dog est dans ma pile. J'en causerai prochainement. Je crois que le bouquin n'est pas très bien diffusé.
En tout cas, bel objet : graphique, tactile.
A suivre...

Plaisante lecture, ce Bad dog. Le texte est limpide et grouille d'images en mouvement, très nettes, procurées par l'écriture très dynamique de l'auteur. Comme le dit Manuel dans son commentaire, l'intrigue passe souvent au second plan, ou en a l'air. Le traitement des personnages prend le dessus et occupe beaucoup d'espace, parfois des chapitres entiers, et l'intrigue apparaît alors comme un prétexte à fabriquer des personnages, plutôt que l'inverse. Je ne vois pas d'inconvénient à ce choix, bien au contraire.

Ce qui m'a dérangé dans ce texte, c'est l'omniscience de l'auteur ; sa façon de s'introduire dans la tête et la peau de tous ses personnages, de tout nous révéler d'eux : leurs pensées, leur histoire. C'est une remarque toute personnelle. Ce choix se discute et se défend. Il se défend d'autant plus ici, puisque l'auteur le maîtrise et s'en sert pour nourrir son récit et permettre au lecteur d'anticiper des scènes ; de précéder les personnages eux-mêmes dans l'histoire. Je dirais que par ce choix, le roman manque un peu de zones d'ombre. Trop d'éléments nous sont livrés sur un plateau ; le lecteur a peu de travail à fournir au cours de sa lecture en ce qui concerne la nature des personnages.
En revanche, ce n'est pas le cas de l'intrigue. Elle fonctionne très bien, car tandis qu'on explore l'espace mental des personnages et qu'on en apprend beaucoup à leur sujet, l'intrigue, elle, reste un mystère pendant longtemps, et peu de clés nous sont fournies pour la démêler.

Concernant le ton global du roman, je dirais qu'il aurait pu être très noir, mais que l'auteur a souhaité diluer cette noirceur avec une importante dose de fantaisie, toujours concernant les personnages. De l'humour et de la dérision pour empêcher que le récit sombre dans l'obscurité. Question de choix, une fois encore, mais aussi de dosage. Pas trop de noir, mais pas trop de fantaisie non plus. La difficulté résidant ici : parvenir à maintenir un rythme et un équilibre jusqu'au bout du récit. C'est assez réussi, en l'occurrence, et très efficace.