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Crash! - J. G Ballard (1973)

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Crash! - J. G Ballard (1973) Empty Crash! - J. G Ballard (1973)

Message par limbes Dim 11 Avr - 21:43

Crash! - J. G Ballard (1973) 7690213_2

Après avoir causé la mort d'un homme lors d'un accident de voiture, James Ballard, le narrateur, développe une véritable obsession pour la tôle froissée. Enrôlé par Vaugham, un ex-chercheur qui aime reconstituer des accidents célèbres et va même jusqu'à en provoquer pour assouvir ses pulsions morbides, Ballard se verra progressivement initié à une nouvelle forme de sexualité : le mariage de la violence, du désir et de la technologie.
Avec Crash !, premier volet de la « Trilogie de béton, J. G. Ballard ausculte les rapports de l'homme à la technologie dans un monde perverti par les machines, et livre un roman troublant, qui mêle perversion sexuelle et réflexion politique
.

***
Voici ce qu’en dit Ballard lui-même dans la préface :
« …je veux voir avant tout dans ce livre le premier roman pornographique fondé sur la technologie. En un sens, la pornographie est la forme la plus intéressante politiquement, montrant comment nous nous manipulons et exploitons les uns les autres de la manière la plus impitoyable. »

Le roman est publié en 1973.
On est en 2010. Toujours des bagnoles. Toujours des accidents. Toujours des progrès technologiques. Toujours pas mal de vide.

Chez Crews, on en vient à les bouffer, au sens propre ; chez Ballard, on se fait mal et plaisir avec, et ce sont elles qui nous avalent. Les deux considèrent la voiture comme une métaphore de la vie des gens, dans nos sociétés.

Ce serait comme si le couple du livre était le couple des Choses, de Perec, avant la collision :
« Ils n’éprouvaient ni joie, ni tristesse, ni même ennui, mais il pouvait leur arriver de se demander s’ils existaient encore, s’ils existaient vraiment : ils ne retiraient de cette question décevante aucune satisfaction particulière, à cette nuance près : il leur semblait parfois, confusément, obscurément, que cette vie était conforme, adéquate, et, paradoxalement nécessaire : ils étaient au coeur du vide (…) »

Ce qui est assez fort dans l’écriture de Ballard, c’est la façon dont il parvient à mélanger la chair et l’artificiel, à combiner les deux ; à la fois la voiture et ses éléments deviennent organiques, ils pulsent, suintent, excitent les yeux et le reste, et en regard les corps s’accidentent, se creusent, se durcissent et se chosifient, au point que le livre produit un effet hallucinatoire, presque, si on accepte de plonger dedans (car il a aussi quelque chose de fastidieux qui ne rend pas sa lecture très facile, ou évidente).

Les limites deviennent floues, on ne sait plus où est l’humain ni où est la machine, les deux s’amalgament en un monstre tentaculaire dans lequel on est pris, et de la même façon que le narrateur (qui s’appelle Ballard, aussi) est fasciné par Vaughan, le lecteur est happé dans un mélange d’effroi et d’excitation, de fébrilité inquiète et de compulsion coupable. Là, vraiment, fond et forme se rejoignent, pour dessiner une scène, un théâtre où les corps mutilés par les machines ouvriraient de nouvelles possibilités fantasmatiques, prospérant sur les vies mécaniques et vides de toutes émotions et jouissances, dans une recherche sans fin ou dont la fin ne pourra être que la mort, la mort spectaculaire menant au plus haut degré l’alliage du sexe et de la technologie.

C’est à la fois un bouquin inadaptable, et en même temps parfaitement adaptable à l’univers de Cronenberg, comme une sorte d’évidence qu’on pourrait à peine discuter. C’est marrant parce que lorsque j’ai vu le film, je l’ai beaucoup plus ressenti comme une histoire d’amour, en réalité, dérangeante et névrotique peut-être, mais d’amour tout de même ; une quête désespérée pour (re)trouver une possibilité de vivre et d’aimer. Car mine de rien l’autre ne disparaît pas complètement, même s’il s’amalgame à la voiture.
Je me suis totalement identifiée au personnage principal, en ce qu’il a à la fois dans une sorte de retrait (du voyeur) et de curiosité qui le pousse à entrer dans cette nouvelle dimension. Je n’ai pas du tout trouvé le film froid et clinique, et du coup, cela fait fouiller en soi et pas que sur la société (si tant est qu’il faille distinguer les deux).

Crash! - J. G Ballard (1973) Crash

C’est un film sur les corps, qui nous ramènent implacablement à notre propre mort, mais aussi sur l’esprit qui les anime, les invente à nouveau, les balance dans une zone trouble où il s’agit d’imaginer de quelles façons nouvelles on pourrait vivre et éprouver. Ce n’est pas dégoûtant ou abject, ou alors de cette façon que l’abject a de côtoyer le désir, voire de s’y confondre.


Dernière édition par limbes le Dim 11 Avr - 22:04, édité 1 fois
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Message par limbes Dim 11 Avr - 22:02

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Message par stalker Dim 11 Avr - 23:59

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Message par limbes Lun 12 Avr - 0:26

Je me souviens de ce jeune gars désolé au point d’en pleurer, devant sa voiture défoncée par mes soins (il revenait d’une compétition de tuning, il pleuvait, j'étais triste pour lui - mais personne n'était blessé) ; je me souviens d’un demi-corps dégueulé d’une bagnole accidentée, sur l’autoroute, et de nous tous qui regardions ; je me rappelle ce type dans un reportage, qui expliquait qu’il prenait sa bagnole pour aller chercher son courrier (7 mètres de distance entre sa maison et sa boîte aux lettres) ; je me rappelle les fois où j’ai baisé dans ou contre une voiture ; je pense à ces GI’s qui se suicident sans le dire pour conserver leur assurance vie, en conduisant à 200 à l’heure bourrés ; je revois ce vague sentiment de liberté à l’occasion de ma première conduite, seule (après ce cauchemar récurrent d’être au volant d’une voiture, mais sans savoir la conduire, et elle s’avance, dans une pente, et je ne contrôle rien) ; je pense que j’aime bien ça, conduire seule, la nuit, sur de longues distances
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Message par stalker Lun 12 Avr - 1:09

Je me souviens de l'émotion à la sortie de Crash, de Cronenberg, en 1996 (je crois). Je ne voulais pas rentrer en voiture.
Les taules froissées me parlaient déjà, mais c'était différent. Dorénavant, il y aurait le film dans mon imaginaire, comme un facteur incontournable dans ma perception des taules (voitures défoncées, sculptures de César broyées, épaves collectées dans la nature, Majorettes métaphores et ingrédients de tentatives plastiques). Et voyeurisme.
On passe, on regarde. On voit et on se détourne (ou pas). On raconte ensuite qu'on ne faisait que passer et qu'on est tombé sur un crash.
Je me souviens d'une nuit où une amie m'a envoyé un lien vers YouTube, pour que je regarde une vidéo qu'elle avait montée. A côté, il y avait des liens vers des vidéos de crashes (pas fictifs). J'en ai ouvert une. Puis deux. Et chacune entraînait d'autres liens, tous en rapport. J'y suis resté deux heures trente.
Un jeune homme a compilé des photos d'accidents routiers, la plupart mortels, et, à la fin du montage, il parle de sa mère tuée dans un accident, à cause d'une autre femme qui s'était endormie, en face. Il parle des individus qui font des pointes sur les autoroutes ou des démonstrations, des choses comme ça, comme dans les films, ou pour épater je ne sais qui, pour démontrer je ne sais quoi, qu'espèrent-ils, je me dis, quand j'en vois.
Mais il y a fascination, paradoxale, ambigüe, variable.
Il y a aussi tabou.
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Message par Ernest Kurtz Lun 12 Avr - 13:39

Ah ! Ballard !! Je me sens carrément des envies de prosélytisme pour cet auteur, sans aucun doute l'un des noms qui restera concernant la littérature de la 2ème partie du XXème siècle !
Il est à mes yeux indispensable d'avoir lu sa trilogie du béton (Crash, l'ile de béton et IGH) et ses trois derniers romans (Super-Cannes, Millenium people et Que notre règne arrive). Tous parlent de l'aliénation de la séduction technologique et disent que sous l'apparat clinquant du progrès technique dont se pare l'homme, le barbare affleure et est toujours prêt à se réveiller: le retour tribal dans les grands ensembles (IGH), l'impunité et la consommation de violence chez les hauts cadres dans leur "ghettos de riches" surprotégés (Super-Cannes), la révolte violente des classes moyennes (Millenium people), le délire consumériste (Que notre règne arrive). Cet auteur était un "déchireur de leurres"; l'animal aux pulsions primaires est toujours présent en nous, le corps social peut tomber en déliquescence. Comme Dick dans un tout autre registre, un grand "ouvreur d'yeux".
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