La vie nouvelle - Philippe Grandrieux (2002)
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La vie nouvelle - Philippe Grandrieux (2002)
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Quelque part en Ex-Europe de l’est, dans une région aride et glacée, sous le regard de personne, un groupe d’hommes examine un groupe de femmes. Ils sont vêtus de manteaux sombres ; elles sont nues.
Le moindre détail compte. Elles doivent être parfaites, irréprochables. Et plus elles seront belles, plus elles seront chères…
La comédienne Anna Mouglalis se trouve parmi ces femmes. Elle restera troublante jusqu’à la fin du film, y compris lorsqu’elle prendra le micro pour interpréter « Smell my scent ».
Le ton est donné dès la première séquence. L’image tremblée tient d’une caméra qu’on trimbale à l’épaule. Le réalisateur lui-même s’en empare parfois, parce qu’une image, un rapport de corps et de lumière, doivent être saisis dans l’instant, absolument.
Et d’une séquence à l’autre, l’image se transforme. L’approche des corps, plutôt que des êtres, s’opère différemment. Les couleurs tournent, comme si chaque séquence nouvelle avariait la précédente. Une succession d’expériences de l’image mises bout à bout, qui forment un film avare en dialogue, soutenu par une bande sonore mi-mécanique, mi-organique du duo grenoblois Etant Donné.
Philippe Grandrieux vient des arts plastiques. Auteurs de nombreuses créations vidéo, il offre ici, après son premier long métrage au cinéma, « Sombre », l’opportunité d’une plongée déroutante dans le corps même de l’image, de sa chair, que ce soit par le grain du 35mm ou par l’oculaire d’une caméra termique : Dans l’ombre, Anna Mouglalis se déplace à la façon d’un félin sensuel. Et tandis que le corps évolue, il refroidit et se pare de taches sombres inquiétantes, captées par cette caméra.
Dans un autre lieu non moins sombre, un vaste sous-sol, des dizaines de personnes sont regroupées. Elles ne se voient pas, mais elles se sentent. On leur demande de hurler, longtemps. Le résultat, tourné en infra-rouge, est effrayant.
Mais j’arrête là ma descripton de certains exemples caractéristiques de ce film qui traite l’image comme, ailleurs, on manipule les mots sans limites aucune.
« La vie nouvelle », me semble-t-il, n’a pas atteint les 400 entrées en salles à sa sortie. Producteur ruiné et CD de la BO condamné au pilon. En revanche, un éditeur a pris le risque de sortir le film en DVD (au cas où certains d’entre vous souhaiteraient en faire l’expérience, un jour).
Un bouquin a également été réalisé sur Philippe Grandrieux, à l’initiative de Nicole Brenez (Cinémathèque française).
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Quelque part en Ex-Europe de l’est, dans une région aride et glacée, sous le regard de personne, un groupe d’hommes examine un groupe de femmes. Ils sont vêtus de manteaux sombres ; elles sont nues.
Le moindre détail compte. Elles doivent être parfaites, irréprochables. Et plus elles seront belles, plus elles seront chères…
La comédienne Anna Mouglalis se trouve parmi ces femmes. Elle restera troublante jusqu’à la fin du film, y compris lorsqu’elle prendra le micro pour interpréter « Smell my scent ».
Le ton est donné dès la première séquence. L’image tremblée tient d’une caméra qu’on trimbale à l’épaule. Le réalisateur lui-même s’en empare parfois, parce qu’une image, un rapport de corps et de lumière, doivent être saisis dans l’instant, absolument.
Et d’une séquence à l’autre, l’image se transforme. L’approche des corps, plutôt que des êtres, s’opère différemment. Les couleurs tournent, comme si chaque séquence nouvelle avariait la précédente. Une succession d’expériences de l’image mises bout à bout, qui forment un film avare en dialogue, soutenu par une bande sonore mi-mécanique, mi-organique du duo grenoblois Etant Donné.
Philippe Grandrieux vient des arts plastiques. Auteurs de nombreuses créations vidéo, il offre ici, après son premier long métrage au cinéma, « Sombre », l’opportunité d’une plongée déroutante dans le corps même de l’image, de sa chair, que ce soit par le grain du 35mm ou par l’oculaire d’une caméra termique : Dans l’ombre, Anna Mouglalis se déplace à la façon d’un félin sensuel. Et tandis que le corps évolue, il refroidit et se pare de taches sombres inquiétantes, captées par cette caméra.
Dans un autre lieu non moins sombre, un vaste sous-sol, des dizaines de personnes sont regroupées. Elles ne se voient pas, mais elles se sentent. On leur demande de hurler, longtemps. Le résultat, tourné en infra-rouge, est effrayant.
Mais j’arrête là ma descripton de certains exemples caractéristiques de ce film qui traite l’image comme, ailleurs, on manipule les mots sans limites aucune.
« La vie nouvelle », me semble-t-il, n’a pas atteint les 400 entrées en salles à sa sortie. Producteur ruiné et CD de la BO condamné au pilon. En revanche, un éditeur a pris le risque de sortir le film en DVD (au cas où certains d’entre vous souhaiteraient en faire l’expérience, un jour).
Un bouquin a également été réalisé sur Philippe Grandrieux, à l’initiative de Nicole Brenez (Cinémathèque française).
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Dernière édition par stalker le Lun 30 Juin - 3:43, édité 1 fois
stalker- Admin
- Messages : 3379
Date d'inscription : 03/06/2008
Localisation : un hameau paumé
Re: La vie nouvelle - Philippe Grandrieux (2002)
Je n'ai vu que Sombre de Grandrieux, c'était il y a quelques temps maintenant mais j'ai encore pas mal d'images en tête, une expérience vraiment particulière. Ta critique donne très envie de voir aussi celui-là, c'est noté.
zero- Messages : 71
Date d'inscription : 11/06/2008
Re: La vie nouvelle - Philippe Grandrieux (2002)
Jamais entendu causer! alors là, je note !
Replay- Messages : 528
Date d'inscription : 03/06/2008
Localisation : Bretagne
Re: La vie nouvelle - Philippe Grandrieux (2002)
La scène de tous ces individus (de tous âges) qui hurlent en choeur dans l'obscurité totale, et dans la nudité aussi, résonne complètement avec les cris d'enthousiasme et de frayeur des enfants, au tout début de Sombre, confrontés au théâtre de Guignol. Je crois que le réalisateur est très friand de ce genre d'expérience immédiate que l'écran et le son imposent.
Friand est sans doute inexact. Encore que.
C'est un plasticien.
En réfléchissant à cette scène, dans La vie nouvelle, j'ai tenté de reconstituer une vague idée de ce que pouvait représenter, en terme de difficultés, l'orchestration d'une séquence pareille. Réunir autant de personnes dans un espace souterrain aveugle (une école d'art, je crois), totalement obscure ; dans la nudité totale, tous agglutinés là à hurler, et hurler, et hurler pour rendre cette chorale effrayante, angoissante et clairement connotée.
C'est monstrueux.
Friand est sans doute inexact. Encore que.
C'est un plasticien.
En réfléchissant à cette scène, dans La vie nouvelle, j'ai tenté de reconstituer une vague idée de ce que pouvait représenter, en terme de difficultés, l'orchestration d'une séquence pareille. Réunir autant de personnes dans un espace souterrain aveugle (une école d'art, je crois), totalement obscure ; dans la nudité totale, tous agglutinés là à hurler, et hurler, et hurler pour rendre cette chorale effrayante, angoissante et clairement connotée.
C'est monstrueux.
stalker- Admin
- Messages : 3379
Date d'inscription : 03/06/2008
Localisation : un hameau paumé
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