L'ascension - Marc-Antoine Mathieu (2005)

Il continuait son ascension, toujours guidé par cette même présence qu’il percevait dans les regards. Il fit d’innombrables rencontres ; un maçon qui fit découvrir le son du grand orgue ; il apprit à lire sur les tapisseries d’une des nefs centrales. Plus tard, aux ateliers d’enluminures, il sut que l’encre des incunables était élaborée avec la cendre des livres brûlés dans l’enfer.
Et toujours, il montait des escaliers.
Il en vint à oublier de compter les années et les niveaux.
Mais jamais il n’omit de dessiner dans le registre le chemin parcouru.

Huit histoires courtes dans ce recueil de Marc-Antoine Mathieu, dont la plupart des textes est signé de son frère Jean-Luc. Certaines remarquables, et d’autres moins. Un air de Poe, Kafka, Borgès ou Buzatti. Toutes mettant en scène des personnages que l’existence a creusés, sculptés, souvent torturés, les renvoyant toujours à eux-mêmes, à leur sort et à leur solitude. Ni glorieux, ni perdants ; ni orgueilleux placés au centre du monde.
Nous ne sommes rien et nous allons mourir tôt ou tard, mais nous avons vécu, et nous le racontons. Nous ne détenons aucune vérité, mais simplement un potentiel à regarder, à interpréter et à conclure pour continuer d’avancer, pour tenter de transmettre, ou bien de garder le secret. Nous échouons souvent au cours de cette trajectoire périlleuse ; nous l’admettons, parfois. Mais c’est pénible d’admettre qu’on n’est pas grand-chose. C’est pénible de se reconnaître dans ce noir et ce blanc qui s’affrontent dans les pages et nous projettent dans des impasses. C’est un régal à lire, mais douloureux à avaler.
On poursuit néanmoins, parce que ça sonne juste.