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La trilogie de la peur - Jacques Tourneur : La Féline (1942)

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La trilogie de la peur - Jacques Tourneur : La Féline (1942) Empty La trilogie de la peur - Jacques Tourneur : La Féline (1942)

Message par Manuel Ven 22 Mai - 15:41

Suivant l'exemple de Txoa, ou plutôt pour être complémentaire de ce qu'il a fait avec George Romero, je propose ici une série évoquant la trilogie de la peur de Jacques Tourneur : La Féline (1942), Vaudou (1943), L'homme-léopard (1943). Une trilogie déjà ancienne, mais qui a révolutionné le cinéma fantastique, puisque la quasi-totalité des films d'horreur réalisé depuis ont porté son influence. Commençons par la Féline.


La trilogie de la peur - Jacques Tourneur : La Féline (1942) Catpeople1942


LA FELINE (Cat People) - Film de 1942, produit par Val Lewton (RKO), réalisé par Jacques Tourneur.

LE FILM : Un dessinateur industriel rencontre dans un zoo une jeune peintre. Ils sympathisent et finissent par se marier. Mais très vite, des événements étranges se déroulent. Le dessinateur soupçonne que sa femme possède le pouvoir de se transformer en panthère et de tuer ceux qui la dérangent. Justement, sa secrétaire est amoureuse de lui et elle se sent bientôt menacée : une présence la suit sur le trottoir et se manifeste à la piscine. Le dessinateur fera alors appel à un psychiatre, le Dr Judd. Après une période de scepticisme, ce dernier sera convaincu de la véracité des soupçons et tentera de neutraliser lui-même la femme-panthère.

L'HISTOIRE DU FILM : La genèse du film est aussi passionnante que le film lui-même. En 1942, la RKO décide de faire des films d'horreur, afin de concurrencer l'Universal, qui exerçait un quasi-monopole sur le genre. Mais comme aucun dirigeant ne désire se mouiller, on crée une unité spéciale qu'on va confier à Val Lewton (drôle de type, d'origine russe, ayant fait tous les métiers, ancien assistant de David O. Selznick). Il engage Jacques Tourneur (réalisateur), Mark Robson (monteur), Dewitt Bodeen (scénariste), et vogue la galère. Le problème est que ces braves gens n'ont pas un dollar de budget. Ils vont néanmoins se lancer dans l'entreprise. La légende affirme que le scénario a été écrit par la secrétaire de Val Lewton. La même légende dit qu'on trouva un titre au hasard et qu'on dessina une affiche, juste pour voir les réactions du public. Toujours est-il que le film est tourné en trois semaines et pour 140 000 dollars. Naturellement, personne n'y croit. À la stupéfaction générale, il va devenir un énorme succès et rapporter 4 millions de dollars. Devenu un film mythique, il aura un remake en 1982, qui restera bien en-deçà de l'original.

L'APPORT DU FILM : « Le Féline » représente un virage capital dans l'histoire du cinéma fantastique. En fait, il est considéré comme l'ancêtre des films d'horreur actuels. Wes Craven et John Carpenter s'en sont ouvertement inspirés. La nouveauté est qu'il tourne le dos au style imposé à l'époque par l'Universal : Frankenstein, Dracula, Fantôme de l'Opéra, etc. Ici, pas de monstre hideux, pas de maquillage exagéré. Jacques Tourneur travaille dans le dépouillement et le non-dit. La panthère, on ne la voit que dans le zoo. À aucun moment, on ne sait si la belle Irina se transforme réellement en fauve, ou si c'est le spectateur qui se l'auto-suggère. Loin des châteaux hantés, le décor reconstitue l'univers quotidien et les personnages portent les vêtements de tout le monde. Cela crée et entretient un sentiment d'angoisse. Le film est déroutant par bien des aspects. Pendant les deux tiers des scènes, l'image est sombre et on entend à peine ce que murmurent les acteurs. Le héros masculin est passif et presque inexistant. L'héroïne est en fait la méchante, et elle n'est pas vraiment méchante, mais plutôt victime du destin. On se demande encore comment le public a pu accrocher à une oeuvre aussi ouvertement à contre-courant des règles hollywoodiennes ! Même si tout cela était largement imposé par le faible budget, ce style a réellement révolutionné le cinéma fantastique.

SCÈNES DU FILM : Jacques Tourneur aligne ici quelques scènes mythiques qu'on retrouvera ensuite dans beaucoup de films d'horreur, démontrant ainsi la profonde influence du film.
-La scène de la piscine, la plus connue : la fille se jette dans l'eau pour échapper au danger, et la panthère tourne autour du bassin. En fait, on ne voit pas la panthère : c'est le spectateur qui déduit qu'elle est là.
-La scène du bus : la fille est suivie, elle a peur et elle sursaute : c'est simplement le bus qui vient la tirer d'embarras. Cette scène est si connue qu'elle a donné son nom à « l'effet-bus », un truc employé dans nombre de films.
-La scène du combat entre le psychiatre et la panthère : là non plus, on ne voit pas la panthère, seulement son ombre.

CONTEXTE DU FILM : Difficile d'évacuer le contexte, puisque nous sommes en 1942. Il est évident que le succès du film s'explique en partie par l'inquiétude générée par l'entrée en guerre toute récente de l'Amérique. Pourtant, il n'y a pas la moindre allusion au conflit, pas même lorsque les personnages parlent de l'Europe. Ce parti pris des auteurs a sans doute renforcé, dans l'esprit des spectateurs, la conviction que la peur produite par le film reflétait les dangers de l'époque.

L'EQUIPE DU FILM : Le budget étant ridicule, « La Féline » a été réalisé avec des gens peu connus. Simone Simon n'a jamais été en Amérique la star qu'elle était en France. Kent Smith deviendra plus tard un visage familier de la télévision : il apparaîtra dans presque toutes les séries américaines. Jack Conway fera pas mal de films pour la RKO. Le monteur Mark Robson deviendra réalisateur. Le producteur Val Lewton décédera en 1951. Les autres sont de parfaits inconnus.

LE FILM AUJOURD'HUI : Il est disponible en DVD aux Editions Montparnasse. En VOST seulement.

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Dernière édition par Manuel le Ven 22 Mai - 23:22, édité 1 fois
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Message par Varg Ven 22 Mai - 18:21

La beauté stupéfiante de ce film est autant due à Tourneur qu'à son chef opérateur, Nicholas Musuraca, hélas ! ignoré dans ta fiche.

C'était souvent le cas pour tous les films de genre, fantastique/horreur ou film noir, de l'époque, qui devaient avant tout aux atmosphères sculptées dans les ombres et les lumières leur efficacité. Ce travail était fortement inspiré par l'expressionnisme allemand, lui même importé par les nombreux cinéastes ayant migré de l'Europe centrale vers les Etats-Unis depuis 1930 environ (Musuraca était lui-même italien). Le travail du chef op' était d'autant plus important que le budget du film était calamiteux car il permettait aussi de pallier, par exemple, les insuffisances des décors (Anthony Mann et John Alton – l'un des tous meilleurs chef op' d'Hollywood – ont tourné deux petits chefs d'œuvre visuels T-men et Raw Deal avec des bouts de ficelle et tout le génie est justement dans la prise de vue, le montage et la photo, c'est-à-dire des éléments uniquement cinématographiques, non littéralement narratifs...)

C'est d'autant plus vrai dans Cat People qui n'est que suggestion et embarras pour le spectateur (qu'en est-il vraiment du statut d'Irena, mi-humaine mi bête ? mi-ange, mi-démon ?) d'où surgit l'angoisse.

On retrouvera ce magnifique duo sur la plupart des métrages de Tourneur et surtout sur le sublimissime Out of the Past, avec Mitchum et Jane Greer, qui est est LE plus beau de tous les films noirs.
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Message par Manuel Ven 22 Mai - 20:32

Oui, oublié Musuraca, désolé.

Ce qui est remarquable, c'est que d'autres réalisateurs, bien qu'ayant un budget plus important, ont repris les recettes de Tourneur. Quand Wes Craven ou John Carpenter insinuent la présence d'un danger sans le montrer, ils font du Tourneur. C'est surprenant qu'un style imposé par le budget soit devenu universel.

Il y aurait beaucoup à dire sur la carrière de Tourneur. Le grand Skorecki, légendaire critique cinéma de Libération, le classait parmi les géants, avec Ford, Eisenstein, Renoir. Mais d'autres ne voient en lui qu'un metteur en scène de série B. Ce serait un vaste débat.
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Message par Varg Ven 22 Mai - 20:40

C'est un excellent réalisateur de genre, tout comme l'était Siodmak ou comme l'était Anthony Mann et il est juste de ne pas les oublier. Ils étaient très bons (Mann étant quand même au-dessus du lot sans doute), pas des génies non plus (Einsenstein ne l'était pas à mon sens et Renoir est très inégal donc je n'en suis pas très sûr non plus).

L'histoire d'Hollywood et l'histoire critique française ont été assez durs avec certaines personnalités du cinéma, répartissant de façon drastique géants et petits maîtres et oubliant sans doute beaucoup ceux-ci. C'est bien dommage.
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Message par Manuel Ven 22 Mai - 23:49

Varg a écrit:C'est un excellent réalisateur de genre, tout comme l'était Siodmak ou comme l'était Anthony Mann et il est juste de ne pas les oublier. Ils étaient très bons (Mann étant quand même au-dessus du lot sans doute), pas des génies non plus (Einsenstein ne l'était pas à mon sens et Renoir est très inégal donc je n'en suis pas très sûr non plus).
Ah, le vaste débat ! En fait, si nous sommes parfois dubitatifs en observant l'oeuvre des grands du 7è Art, c'est parce que nous autres, gens contemporains, sommes bien vaniteux et croyons tout savoir. Nous avons oublié que les géants du cinéma ont passé leur vie à chercher des producteurs, parfois sans en trouver !

Oui, c'est gênant de se dire que John Ford (le seul à avoir gagné trois oscars trois années consécutives) avait du mal à trouver des producteurs. Et les autres aussi. Voilà pourquoi leur oeuvre nous paraît parfois inégale, leur parcours parfois paradoxal. Ford, Renoir, Mann, Murnau, Carné, Capra. Tous à la même enseigne. Quant à Eisenstein, il avait un autre problème : la censure stalinienne.

Dès lors, la division entre réalisateurs de série A ou B devient encore plus arbitraire. Mann est sorti de la série B grâce aux cinq westerns qu'il a fait avec James Stewart. Tourneur n'en est jamais sorti, par manque de chance ou de volonté.
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Message par Varg Sam 23 Mai - 0:19

Cela ne fonctionnait pas ainsi. Les studios et les producteurs étaient tout à fait omnipotents, il n'y a jamais eu de réel film de réalisateur à l'intérieur de ce système sauf Citizen Kane pour lequel Welles avait obtenu le final cut.

Pour faire le film que l'on souhaitait, il fallait une indépendance économique (et donc sortir des studios pour monter le sien) que peu ont tenté (Aldrich l'a fait, ce fut catastrophique financièrement mais au moins il put faire les films qu'il souhaitait. Kubrick le fit aussi. Wyler également, qui fut ruiné par son ami Capra). Ou alors être astucieux comme Ford, qui ne faisait qu'une ou deux prises de chaque scène afin de ne pas laisser au studio la possiblité d'influencer le montage.

Tout comme était codifiées les places de chacun : les scénaristes devaient le rester. Il fallut attendre Preston Sturges et surtout le succès de son Sullivan's Travels pour que les scénaristes comme Billy Wilder passe de l'autre côté. Sinon, les réalisateurs étaient liés aux studios, qui ou non les utilisaient (de même pour les acteurs...).
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